Dialogue à trois voix



Melpomène
(la tragédie)





Thalie
(la comédie)




Mère, laquelle de nous deux enfanta ce siècle…
Moi je dis que c’est moi dans l’horreur et le cri. Et l’absurde sans mot.

Je me souviens…

Avant l’’horreur, le rire et l’insouciance et la légèreté…
C’est moi qui l’enfantai !

Je me souviens, ma fille…

L’étreinte du silence, qui déforme les mots et les visages…
Ce siècle est bien de moi !

L’homme qui rit dans son désert, s’entretient d’une étoile. C’est chez moi qu’il apprend le frivole et l’amer et l’arête du rire sous les vents trop aigus…
Mère, dites, dites-nous !

Mes filles, mon nom n’est de juger mais de me souvenir. De tenir en mon cœur le poids d’un cri, d’un rire, tant qu’il le veuille et aille…
Mon nom n’est de juger… Mes filles ne cherchez votre dû sur un tas de décombres. Plutôt gardez en votre cœur tout souffle de ce siècle – espoir ou cri, qu’importe – qu’il aille en votre cœur s’y entende et s’apaise, et aille son chemin parmi les hommes. Mes filles, gardez en votre cœur sans chercher votre bien.

Anne-Marie Ciofolo






Mnémosyne
(la mémoire)